L’alcool a souvent teinté le flux argentique de mes soirées. Des films naissant dans un nuage d’éthanol, développés dans la chimie et révélés dans le négatif de mes nuits.
L’audace qui m’animait au fil des verres était un prétexte pour ce qui se devait d’être annihilé : le bruit. Celui de mes émotions, de la solitude et des relations. Ce bruit intérieur se taisait une fois dans la foule, et dans le plaisir du bordel ambiant qui m’entourait.
J’aimais que la nuit s’étire infiniment comme un voile sur toute la ville, je voulais y croiser le plus d’âmes possible.
Les lendemains ensoleillés n’existent que dans les limites que l’on s’impose : moi, je n’en avais aucune.
La modération n’a jamais existé dans mon esprit, mon hémisphère droit se l’est interdite. Nul besoin d’ébriété pour rire à gorge déployée, engloutir un kebab sur le chemin du retour, s’abandonner à un eye contact un peu trop prolongé, onduler les hanches sous les basses qui font vibrer.
Il a fallu réapprendre l’inhibition et compter les jours de clarté, se rencontrer des centaines de fois puis s’oublier. Transposer toute cette effervescence dans autre chose, là où l’on a pris soin de ne plus aller. Le dimanche qui retrouve ses couleurs ; les contours de la sérotonine qui se dessinent ; les décisions lucides ; les prémices du sexe sobre, l’amour sans artifices ; l’absence de gueule de bois ; nulle promesse que l’on ne tiendra pas ; les souvenirs palpables, la conscience aiguisée.
Cette douce sensation de maîtrise et de satiété.